Le Destin a divers noms ou divers agents qui se rapportent tous à l’idée de « la part réservée à chaque être » (de vie, de bonheur, de malheur). On connaît bien les Parques de la mythologie latine, les trois sœurs qui filaient la vie de l’homme, la dernière en coupant le fil. Dans la mythologie grecque, elles portent le nom de « MOIRES ». Les Moires étaient trois: Clotho filait les jours et les événements de la vie. Lachesis enroulait le fil et tirait le sort de chacun. Atropos coupait avec ses ciseaux le fil de la vie.

Catherine Chabrot puise dans ce patrimoine commun la représentation du destin et lui donne corps sans jamais montrer les 3 sœurs. Elles sous-tendent la démarche de l’artiste, donnent à la série un sens ;  une tension particulière, comme la main qui bande l’arc avant que la flèche ne soit décochée : elle montre l’homme qui se débat contre ces forces invisibles et présentes ; partout et nulle part. Cet homme, équilibriste sur un fil, fait défiler devant nos yeux des réminiscences classiques, fugaces et variées, du souvenir de Michel-Ange et des scènes peintes sur les amphores grecques, au clin d’œil moderne aux débuts du cinéma d’animation …

L’originalité de cette production est liée au support : la grande réussite de C. Chabrot est d’avoir pensé à inscrire cette figuration du destin « part réservée à chaque être » sur les douelles des tonneaux où le vin a mûri des années durant, tonneaux vidés, éclatés en ces éléments premiers que sont les douelles, mais peintes  sur la face cachée, celle qui a travaillé lentement dans l’obscurité liquide, sur laquelle, avec le temps s’est déposée « la part des anges » sous forme de tanins grenat, de taches et de minuscules cristaux. Indirectement, l’artiste rend aussi hommage aux chênes de la forêt de Tronçais et réussit à donner une âme aux lames de bois !

Françoise Arquetout

 

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